Gods and Monsters, adaptation d’un roman dont le titre, Le Père de Frankenstein, évoque davantage la biographie que l’œuvre de fiction, est pourtant, au-delà du biopic qu’il semble à première vue, une réflexion douce-amère sur la création, assorti d’un hommage lucide aux faiseurs d’histoires.
Le film s’inspire d’éléments réels de la vie de James Whale, réalisateur pour les studios Universal des chefs d’œuvre que sont Frankenstein et la Fiancée de Frankenstein, pour construire un récit purement imaginaire sur la relation possible d’un réalisateur vieillissant avec sa « créature », incarnée sous les traits d’un de ses jeunes employés de maison dont il devient une sorte de Pygmalion. Mais tout autant que le Dieu du titre, Whale, le personnage, se reconnait aussi dans ce monstre dont il a par le passé adapté l’histoire tragique, personnage maudit qui n’accepte pas tout à fait ce qu’il est, condamné malgré lui à n’être jamais perçu que comme un freak par ses semblables.
L’homosexualité de Whale suggère une lecture sociétale du film, mais l’intelligence dont fait preuve le scénario – récompensé par l’Oscar de la meilleure adaptation – c’est de toujours brouiller les frontières entre métaphore et commentaire social, fiction et réalité, et d’ancrer son récit dans le domaine épuré de la fable moderne : un film simple et intelligent.