Unexploited !
Référence à la blaxploitation, bien sûr. Mais pas seulement. Si le genre sus-nommé annonce très clairement le principe sur lequel il repose, l’exploitation de clichés définit plus largement toute l’histoire, ou presque, des personnages noirs dans le cinéma US.
Dans un premier temps, la caricature n’est même pas voilée, puisqu’elle est le ressort même du blackface : des acteurs blancs grimés interprétant des stéréotypes de personnages noirs. Tout aussi stéréotypé et tout aussi raciste est le personnage de Stepin Fetchit dans les années 30. Stupide, paresseux, pleurnichard, celui-ci connaitra un grand succès, qui vaudra à son créateur Lincoln Perry de devenir le premier acteur noir millionnaire. Avec les années, Hollywood s’adoucit en apparence, mais les protagonistes noirs dotés d’un minimum d’épaisseur sont toujours aussi rares. Ceux-ci sont abonnés aux rôles de majordomes dévoués, de sidekicks débonnaires, ou de simple faire-valoir permettant de faire éclater toute la grandeur d’âme du héros blanc.
Puis vint Sidney Poitier, première superstar noire du cinéma américain. Enfin, du changement ? Pas vraiment : à l’écran, Poitier demeure l’homme noir lisse, apolitique, asexué… inoffensif. Un personnage que le public blanc aime aimer, car finalement il lui ressemble, mais en lequel les noirs auront bien du mal à se reconnaître. Sweet Sweetback’s Baadasssss Song marquera une date en proposant enfin, dans un grand succès populaire, un personnage authentique, indépendant, incontrôlable, et en colère. La charge de Van Peebles ne restera pas sans suite mais jamais, jusqu’à Spike Lee, les films dont l’écriture fera écho à la réalité de la population noire-américaine ne connaîtront le même succès.
Au contraire, c’est la blaxploitation, genre éminemment commercial et tout sauf politique, qui aura les faveurs du public, qu’il soit blanc ou noir, d’ailleurs. Vous l’aurez compris, avant Sweetback, trouver dans le cinéma US un personnage d’homme noir réaliste, incarné, voire un tant soit peu engagé, relève de la gageure (sans parler de ceux de femmes, pour ainsi dire absentes de tout rôle significatif). Même après lui, la logique mercantile a laissé ses héritiers dans l’ombre. Les exemples, rares et épars, existent pourtant. C’est sur quatre d’entre eux que nous avons voulu nous pencher avec cette thématique, de laquelle il faut rapprocher le « Within Our Gates » d’Oscar Michaux, que nous vous proposons en off.
Nous sommes en général plutôt friands de cinéma d’exploitation. Mais cette fois, c’est précisément de dire non à l’exploitation qu’il s’agira !
17 / 04 / 2019 - 17h00
19 / 04 / 2019 - 17h00
20 / 04 / 2019 - 22h00
21 / 04 / 2019 - 16h30