Hallucinations Collectives

Éclipsée par les deux mastodontes du film de « chasse aux sorcières » que sont La Marque du Diable et Le Grand Inquisiteur, Le Marteau des Sorcières est pourtant la fiction qui tire le mieux sur les ficelles du cinéma d’exploitation pour articuler sa quête de véracité.
Bien qu’il calque sa trame sur celle d’un roman historique éponyme, le film d’Otakar Vávra va puiser son authenticité dans les archives de l’Inquisition, allant jusqu’à reproduire les paroles exactes prononcées lors des procès. D’un réalisme glaçant, les séquences de tortures suivent scrupuleusement les indications du Malleus Maleficarum, traité référentiel datant du XVe siècle, qui détaille la façon de lutter contre la sorcellerie et d’obtenir des aveux afin d’instruire un procès.
Tourné en 1969, juste avant les grandes purges et le retour à une censure étatique forte en Tchécoslovaquie, Le Marteau des Sorcières est aussi un implacable réquisitoire contre les pratiques déviantes (délation, tortures, autocritique forcée…) des régimes autoritaires.